06/12/2006

La vie cachée des enfants des sectes

Pour prévenir les dérives, une commission d'enquête parlementaire préconise de limiter l'enseignement à domicile. « La Croix » rapporte les témoignages de deux jeunes femmes ayant vécu, enfants, dans une secte 
Membres de la communauté "Tabitha's Place", qui fait partie du mouvement fondamentaliste américain Communauté du Royaume du Nord-est des Frères de Plymouth, dont les fidèles affirment suivre strictement la Bible. Le 21 novembre 2006, au manoir de Navarrenx, à Sus 65.
Interdiction d'écouter de la musique, de regarder des films, de sortir cheveux au vent, de porter des pantalons… La scène ne se passe pas chez les talibans, mais en France. Née dans une secte prônant l'application à la lettre des versets de la Bible, Nadège, aujourd'hui âgée de 28 ans, a dû elle aussi se plier à ces règles durant l'enfance.
Jusqu'à son « évasion » réussie en 1999. « Petite, je ne trouvais rien à redire à tout cela, confie-t-elle aujourd'hui. Comment aurais-je pu ? Je vivais là depuis ma naissance, entourée de mes parents, grands-parents, oncles et cousins. J'étais persuadée que nous étions les seuls dans le droit chemin et qu'un "étang de feu" attendait tous les autres. »
À l'adolescence pourtant, Nadège commence à remettre en question les valeurs de la secte. Et cela, notamment grâce aux amitiés qu'elle lie au collège. « Je ne savais pas quoi répondre, raconte-t-elle, quand mes copines me demandaient pourquoi moi et mes cousins ne pouvions pas aller à la piscine, manger à la cantine, faire des sorties scolaires, assister à certains cours de biologie. » À la fin du collège, la sanction tombe : le chef de la communauté lui interdit de poursuivre ses études. Tirant du même coup un trait sur le rêve de l'adolescente : devenir infirmière.

PLONGÉE DANS LA DÉPRESSION

La décision plonge Nadège dans une profonde dépression. Elle pense même au suicide. « Je n'osais pas dire, tout haut, mon dépit. Cela m'aurait fait courir le risque d'être mise au ban de la communauté. Et quand on a très peu de contacts avec l'extérieur, c'est un risque qu'on ne prend pas. »
Sa chance ? Recueillir un jour les confidences de son cousin, bien décidé, lui, à tout faire pour s'évader de la communauté en vue de se marier avec la femme qu'il aime. Quelques mois plus tard, c'est au tour d'une cousine d'émettre un souhait identique, lors d'une discussion avec Nadège. À partir de ce jour, les trois jeunes décident de mettre au point un plan d'évasion. Au final, une dizaine de jeunes s'échapperont de la communauté le même jour. Nadège avait alors 20 ans. « Nous avions préparé notre départ pendant plus de six mois : il fallait trouver un petit boulot pour survivre, demander à nos connaissances de nous héberger. Le tout sans que rien ne filtre. »
Une fois le pas sauté, la jeune femme se retrouve isolée, sans repère. « Pendant longtemps, je n'ai plus su ce qu'était le bien ou le mal, témoigne-t-elle. J'étais totalement déboussolée. Heureusement, j'ai fait la connaissance de mon mari. Il a été d'un très grand soutien. » Aujourd'hui maman, Nadège souffre de vivre coupée des siens, restés dans la communauté. Et pense surtout à tous les enfants de la secte qui n'ont plus, comme à son époque, la chance d'être scolarisés. Ils sont désormais éduqués à domicile. « Moi, c'est l'école qui m'a sauvée, assure-t-elle. Comment ces petits pourront-ils, sans cela, développer un quelconque esprit critique vis-à-vis du reste du groupe ? »

"COMPLÈTEMENT HYPNOTISÉE PAR MON CHEF"

Changement de décor. La secte dans laquelle est entrée Hélène à 16 ans, n'avait, elle, a priori rien d'inquiétant. Elle n'avait en tout cas rien de commun avec les principes stricts et la vie en communauté imposés à Nadège. « Le gourou nous demandait simplement de le retrouver le dimanche dans un atelier d'artiste de la capitale pour y apprendre les principes chamaniques », se souvient Hélène, aujourd'hui âgée de 24 ans.
Et pourtant. L'adolescente, qui y suivait sa mère tous les week-ends, a dû, elle aussi, s'initier aux « lavages de mémoire ». « Le leader du groupe m'expliquait comment totalement me couper de mon père, qui venait de divorcer d'avec ma mère. Il m'assurait que je vivrais mieux en oubliant mon passé. Il a d'ailleurs réussi : j'ai fini par ne plus vouloir le voir. » À la demande du gourou, il fallait aussi à la jeune fille « découpler ses convictions de son "être intérieur" », au risque de développer une double personnalité. Le tout afin de « vivre plus intensément le moment présent ». « Je ressortais épuisée des dimanches passés à pratiquer ce genre d'exercices, raconte Hélène. Je finissais aussi par être complètement hypnotisée par notre chef. »
À l'époque, la jeune fille passe pour être une collégienne sans histoire. Les enseignants ne notent rien d'anormal et se disent même plutôt satisfaits de ses résultats scolaires. « Je ne parlais à personne du chamanisme. J'éprouvais une certaine fierté à être seule à en connaître les principes et à les appliquer. » Le gourou ne s'en tient pas à la seule manipulation mentale. L'adolescente consent à une séance « d'harmonisation des chakras », consistant à se dénuder pour se prêter à divers massages. Choquée, mais mise en confiance par le leader du groupe, Hélène se convainc de la normalité de tels attouchements et n'en parle à personne.

"J'AI RÉALISÉ QUE C'ÉTAIT N'IMPORTE QUOI !"

Sa grande chance, paradoxalement, sera d'être l'une des adeptes préférées du gourou. Convaincu de son intelligence, il conseille à la jeune bachelière d'entamer des études de psychologie dans le but de devenir une praticienne d'obédience « chamanique ». Mauvais calcul. « En fac, j'ai découvert l'extrême rigueur des théories de Freud, Jung et Lacan, comparées à tout ce qu'il m'enseignait, précise Hélène. À toutes mes questions gênantes, il m'assurait que le mystère était la cause de tout. J'ai réalisé que c'était n'importe quoi ! » Alors que la jeune femme commence à douter du sérieux des valeurs véhiculées dans la secte, sa mère, elle, s'y implique davantage.
Sur les conseils du gourou, cette dernière vend son pavillon, part en préretraite, quitte son compagnon et décide de fonder un groupe « chamanique » en province. Doutant à son tour du bien-fondé de son choix, la mère d'Hélène souffre alors d'une profonde dépression qui la mène au suicide en 2005. Âgée de 23 ans, Hélène traverse à ce moment-là une crise longue et douloureuse. « Tout d'un coup, je me suis retrouvée totalement vide et hantée par la peur du suicide, explique-t-elle. Heureusement, mon père et de ma soeur m'ont apporté un réel soutien. C'est grâce à eux que j'ai pu me reconstruire. »
Marie BOETON
in La Croix le 18/12/06

06/06/2006

Les enfants d’une secte


En France toujours, une autre des associations de lutte contre les sectes a publié, pour la première fois en juin 2004, un dossier special sur les enfants et les sectes que vous pouvez peut-être encore trouver sur leur site www.unadfi.org

Bien que nous ne soyons pas tout a fait d'accord avec les deux derniers articles, nous les reproduisons ci dessous, il peuvent toujours servir a exercer votre esprit critique ou dans des procedures dures durent...

Cette assistante sociale courageusement avec l'aide de Mme Hayat el Mountacir avait réssi contre toute attente à sortir les enfants des griffes de la communauté de Maité Castano
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Alors assistante sociale d’un service de protection de l’enfance, j’ai été mandatée par un juge des enfants, pour effectuer une enquête sociale concernant trois jeunes enfants ( 5 ans, 4 ans et 1 an ½ ) vivant avec leurs parents dans une secte.

Les conditions difficiles et délicates de mon intervention, m’ont permis de prendre la mesure de leur souffrance et du danger encouru par tous ceux (jeunes enfants et adolescents) qui vivaient ou avaient vécu dans cette secte.

1 – Coupure avec l’extérieur, isolement et enfermement des enfants et des adultes

Les parents ayant été amenés à rompre avec leurs familles et leurs amis, les enfants ne connaissaient pas ou très peu leurs grands parents et leurs familles proches.

2 – Pour éviter qu’ils aient des contacts avec l’extérieur, les enfants étaient retirés de leurs écoles pour suivre les cours par correspondance du CNED[3], sous prétexte d’activités musicales développées. Lors des rares visites des inspecteurs de l’ Education Nationale, ceux ci avaient droit a une véritable mise en scène très séduisante qui ne leur permettait pas d’évaluer le bien fondé de cette scolarisation interne, et encore moins le danger encouru par ces enfants.

3 – Les manifestations affectives et les marques d’intérêt à l’égard des enfants étaient considérées comme mauvaises.

Ainsi les tout petits passaient leurs vies dans leurs parcs, sans jouets : il était interdit aux parents et à quiconque de les prendre dans leurs bras, de les consoler, de les câliner ou de jouer avec eux. Si un parent dérogeait, il était dénoncé par un autre adepte et réprimandé. Ces enfants étaient affectivement carencés et peu éveillés au monde.

Les enfants devaient ainsi devenir résistants pour « vaincre les forces du mal et les manifestations du malin ».

4 – Les enfants comme les adultes devaient affronter des situations de plus en plus difficiles pour s’endurcir et être meilleurs que les autres.

L’élitisme et la mégalomanie étaient poussés à l’extrême. Les enfants devaient tous jouer d’un instrument de musique qui leur était imposé et être les premiers au conservatoire. Ils devaient travailler (devoirs et musique) sans relâche et avec acharnement jusque tard dans la nuit. Leurs résultats et leurs notes étaient comparés. Ils étaient ainsi souvent blâmés publiquement et punis.

5 – Les enfants comme les adultes, étaient tenus à une soumission et une obéissance aveugle au gourou et à son épouse. Les enfants ne relevaient plus de l’autorité de leurs parents, mais de celle du couple leader qui décidait des orientations scolaires et professionnelles : d’où une scolarité perturbée, des blocages et des découragements. Lorsque les enfants n’étaient pas « conformes », les parents se faisaient vertement réprimander devant leurs enfants et les autres adeptes : ils étaient considérés comme inaptes à élever leur enfants. Ainsi les enfants de tous âges étaient livrés sans défense, au despotisme du couple.

6 – La délation et la surveillance des uns par les autres, instauraient un climat de méfiance et d’isolement avec impossibilité de communiquer : les enfants se dénonçaient entre eux et dénonçaient leurs parents.


7 – Mauvais traitements physiques.

Ø Les règles de vie strictes et répressives (jeûnes, sommeil réduit, travail acharné, aucun loisir, aucune sortie, aucun jeu) entraînaient une grande fatigue, voire une faiblesse physique qui fragilisaient enfants et adultes.

Ø Les coups de ceinture étaient fréquemment donnés par les parents, même aux plus petits.

Ø Coups de poing, gifles étaient donnés par le couple leader. Obligation était faite pour tous, y compris les enfants en bas âge, d’assister au culte pendant 5/6 heures, sans bouger, parler ou faire ses besoins naturels. Si un enfant pleurait, remuait, le père ou la mère l’emmenait pour le corriger, sous l’œil désapprobateur de l’assistance.

Ø Coups de règle sur les doigts, bouches scotchées, suppressions de repas, mises au coin pendant des heures.

Ø Pas le droit de courir, il fallait se comporter dignement.


8 – Sévices moraux.

Ø Isolement parents-enfants : à partir de 5 ans, les petits étaient séparés de leurs parents occupés à d’autres tâches. Ils étaient alors pris en charge par la femme du gourou dans un autre lieu, pouvant être enfermés dans une chambre ou mis dans le noir.

Ø Le maître mot était : « il faut briser l’enfant pour le soumettre, le rendre docile et obéissant ».

En effet ces enfants étaient très sages, soumis, apeurés, tristes, éteints, repliés sur eux mêmes, sans spontanéité. Ils ne savaient pas jouer.

Ø L’autocritique, les confessions écrites ou publiques, suivies de punitions, entrete-naient un climat de terreur. Ces tribunaux de torture morale pour adultes et enfants, avec procès d’intention, arrivaient à soumettre une adolescente, en l’humiliant sans arrêt, en la mettant en quarantaine, etc…

9 – La déstructuration de la personnalité ou l’impossibilité pour l’enfant de se structurer, dans un climat permanent d’angoisse et de culpabilité par peur de déplaire au couple de gourous et d’être dénoncé.

Ø Changements continuels d’instruments de musique imposés.

Ø Instabilité permanente des lieux où dormir : le soir les enfants se déplaçaient avec leur matelas et demandaient à l’épouse du gourou où ils devaient dormir.

Ø Lorsque les enfants obtenaient de bons résultats scolaires et musicaux et qu’ils se montraient contents d’eux, ils étaient repris, humiliés et taxés d’orgueil.

Ø Quand les petits mangeaient leur soupe avec une petite cuillère, on leur ordonnait d’en prendre une grande ; si la fois suivante ils prenaient une grande cuillère, on les obligeait à en prendre une petite… Leurs repères étaient sans cesse brouillés.

En conclusion ces enfants étaient en danger moral et physique du fait de l’asservissement mental de leurs parents par le couple leader. Déresponsabilisés, ces parents n’avaient plus de prise sur leurs enfants ni de communication avec eux. Pris en charge par le couple de gourous, enfermés, oppressés, soumis, déstructurés et manipulés, les enfants étaient brisés dans le développement de leur personnalité. La scolarisation interne empêchait qu’ils restent en contact avec une certaine réalité et gardent une ouverture sur le monde.

Aussi ces trois enfants ont-ils été placés par le juge des enfants chez leurs grands parents et ils y sont toujours depuis quinze ans. Grâce à ces derniers, tous les trois font de bonnes études, et semblent autonomes et équilibrés. Ils n’ont pas revu leurs parents depuis lors, ceux-ci vivant à l’étranger où ils se sont réfugiés avec le couple de gourous, après le placement de tous les enfants de la secte par le juge et le procès de membres de celle-ci.


L’enfance maltraitée en milieu sectaire

L’OMS (Organisation Mondiale de la Santé) définit la violence à l’égard des enfants comme suit : « Les mauvais traitements de l’enfant ou la maltraitance s’étendent à toutes les formes de mauvais traitements physiques ou affectifs, de sévices sexuels, d’abandon ou de négligence, d’exploitation commerciale ou autre, entraînant un préjudice réel ou potentiel pour la santé de l’enfant, sa survie, son développement ou sa dignité, dans le contexte d’une relation de responsabilité, de confiance ou de pouvoir. »

Un nombre important d’enfants nés ou éduqués dans un milieu sectaire totalitaire est confronté à des risques importants de maltraitance de la part non seulement de leur entourage familial mais également des autres membres du groupe, et en particulier du gourou.

Le groupe, ou la cellule familiale fonctionnant selon un modèle sectaire, constitue un milieu pathogène pour l’enfant.

La maltraitance induite par la secte (groupe-doctrine-gourou), dépossède l’enfant de son identité physique, psychique et émotionnelle, niant son existence en tant que sujet de droit pour en faire un objet aliéné au système sectaire qui se perçoit comme hors du monde. Le refus du libre arbitre, du poids de la société et de ses institutions font que la pression sociale peut paraître inexistante et inefficace sur les adeptes qui vivent une « idéologie hors de la société ». Endoctrinés, les enfants n’ont comme référent que « la secte » et sont dans l’incapacité de comprendre le sens des institutions de l’Etat (Education, justice, médecine...) et des valeurs qu’il prône « Liberté – Egalité - Fraternité », valeurs non reconnues et souvent combattues par le groupe.

L’enfant évoluant dans un environnement sectaire est menacé à deux titres : mineur et adepte. Son statut de mineur le place, de fait, dans un état de vulnérabilité face aux actes délictueux commis à son égard. De plus, le groupe sectaire totalitaire prive l’individu, notamment par le biais de la manipulation mentale, de son libre arbitre et de sa capacité à penser et agir par lui-même pour le placer en état de sujétion (cf. : loi About-Picard du 12 juin 2001).

Devenu objet, l’enfant ne possède plus de droit mais uniquement des devoirs, il doit tenir un rôle, remplir une mission auprès du groupe et du leader, dans la logique d’une obéissance absolue.

Dans ce cadre de vie perverti, nuisible à l’individu, les actes de maltraitance sont perçus et présentés par ceux qui les commettent comme profitables à celui qui les subit. Ils sont érigés en valeurs. Les mineurs subissent des atteintes graves à leur intégrité et à leurs droits aux niveaux physique, psychologique, familial et social. Dans tel groupe, le leader abusera de mineurs afin de les purifier et de leur permettre d’accéder à un état supérieur (les cas de pédophilie dans les sectes sont nombreux). Tel autre encouragera les parents à châtier leurs enfants en leur infligeant des sévices physiques (coups, mutilations, privation de nourriture, défaut de soins) ou psychologiques (brimades, humiliations, déni de l’identité, interdit de l’opposition…).

La cellule familiale ne représente plus la cellule de base, elle est soumise à l’autorité et au contrôle du groupe. Les parents, sont symboliquement et effectivement dépossédés de leur autorité et de leur fonction qui sont transférées aux structures sectaires. Le lien familial est assujetti au lien groupal, ce qui entraîne de graves problèmes dans la construction de l’identité et dans les relations parents-enfants. La socialisation se fait d'abord (et parfois exclusivement) dans la secte avec un modèle unique, présenté comme le meilleur. La nécessité de fréquenter le moins possible les autres, car ils appartiennent à des familles "mauvaises", et d'être en même temps un "modèle" pour ces autres familles isole l'enfant dans une diffé-rence valorisée à l'intérieur du groupe et incomprise à l'extérieur. La mise à l’écart de la société civile est génératrice de comportements nuisibles au développement social et intellectuel de l’enfant : scolarisation défaillante ou absente, domaines d’apprentissage limités, refus de participer aux activités civiques, absence de loisirs… pour ne pas tous les citer.

Pour l’UNADEFI, la maltraitance des enfants en milieu sectaire est un fait indéniable, auquel elle se trouve confrontée régulièrement et, parfois, dans des conditions dramatiques.

La plupart du temps, les cas nous sont rapportés par l’intermédiaire de proches qui témoignent de leur inquiétude due à l’adhésion d’un des leurs à un groupe sectaire ou lors d’actions en justice, notamment dans les procédures de divorce. Inquiets pour l’avenir de l’enfant, ils font état des dangers encourus par celui-ci s’il demeure dans un environnement sectaire par l’intermédiaire de l’un ou de ses deux parents.

Certaines situations peuvent devenir critiques et même létales si le danger n’a pu être détecté à temps.

Rares sont les cas où les mineurs saisissent, de leur propre chef, une association ou une institution afin de témoigner de leurs souffrances. Nous savons qu’il est toujours difficile pour un enfant maltraité de se livrer à un tiers, du fait de la culpabilité et de la honte qu’il éprouve et de l’interdit qui lui en est fait.

A l’ignorance de ses droits et de ses recours mais, avant tout, de la notion « intégrité » s’ajoute chez le jeune adepte, la crainte inculquée du monde extérieur.

A l’adolescence se produisent parfois des phénomènes de révolte, qui poussent les jeunes à tenter de s’éloigner de cet environnement nocif, mais ce n’est, bien souvent, que longtemps après leur majorité que certains entament des démarches ; un temps est nécessaire à leur reconstruction psychologique.

Dans son rapport 2003, la MIVILUDES propose un allongement du délai de prescription, qui « partirait du jour où la victime serait en état de déposer plainte » et non du jour où l’infraction a été commise. Le cadre sectaire où la victime se retrouve en « état de sujétion psychologique ou physique » nécessite « un régime spécifique de prescription de l’action publique ». Une proposition grandement souhaitée par l’UNADEFI et qui va dans le sens d’une reconnaissance accrue des actes de maltraitance spécifiquement liés au phénomène sectaire qui restent, à ce jour, pas assez connus des milieux institutionnels et des professionnels de l’enfance.

L’information, la prévention et la formation du public doivent amener à une prise de conscience de la spécificité des formes de maltraitance infantile liées aux sectes, spécificité qui rend plus difficile son signalement auprès des associations et des institutions compétentes.

L’UNADFI, sous l'impulsion de Mme Janine Tavernier, forte de 30 ans d’expérience dans le domaine des sectes, est un observateur et un acteur privilégié de la défense des droits de l’individu et notamment de la protection de l’enfance confrontée à la maltraitance sectaire dont la réalité ne peut être niée.

Dans notre action d’aide aux victimes, le respect des droits de l’Enfant est une préoccupation constante pour laquelle nous ne cessons de nous battre.

insertion RPE "si cela était vrai nous le saurions et les parents qui viennent nous voir et raconter leur chemin aprés avoir été surprocéduralisés et victimologisés, sont en colère contre l'instrumentalisation de leurs souffrances"

La Fonction parentale dans les sectes

Comment les sectes conçoivent-elles le rôle des parents ? Y a-t-il une fonction parentale ? Et sous quelle forme ? Cette fonction, si elle existe, est toujours pensée à l’intérieur de la doctrine de la secte et n’a donc de sens qu’au sein de celle-ci.

L’enfant enjeu – L’enfant menace

En règle générale l’enfant est conçu à la fois comme un enjeu, du point de vue théorique (doctrine) et aussi pratique (extension de la secte), mais peut dans certains groupes apparaître comme une menace pour la toute-puissance du gourou.

L’enfant enjeu

Globalement, l’enfant est présenté comme l’avenir de l’humanité. Il doit être à l’origine d’une « nouvelle race humaine parfaite » selon le langage de la secte. L’éducation de l’enfant est donc posée comme un enjeu dépassant l’enfant lui-même et ses parents biologiques, elle est sous la responsabilité de la communauté sectaire qui établit une grille d’éducation pour que l’enfant devienne un adulte correspondant à l’idéal de la secte.

Avant d’être un enfant, il est d’abord un adepte en devenir. Son éducation doit en faire un serviteur inconditionnel car il s’agit pour le gourou d’assurer la survie de la secte en préparant les enfants qui assureront la relève.

L’enfant est donc un élément important pour la survie et le développement de la secte.

L’enfant menace

L’enfant peut également représenter une menace car il risque de réveiller chez ses parents des sentiments d’amour filial suffisamment forts pour supplanter le gourou dans leur cœur ; ou tout au moins pour les éloigner un temps du groupe au profit de leur enfant.

Les soins requis par l’enfant réduiront d’autant le temps consacré au prosélytisme ou aux tâches internes à la secte.

La fonction parentale dévoyée

La fonction parentale, exercée ou non par les vrais parents, est souvent régie par la doctrine de la secte. Parfois, le parent n’a eu qu’un rôle de géniteur. Il arrive même que ce rôle soit nié, la conception de l’enfant étant attribuée au gourou ou à des « êtres supérieurs ». L’enfant devient alors l’enfant de la secte, qui sera sa seule famille. C’est le gourou qui est le Parent, aucun autre attachement filial n’est possible.

De même que le parent est totalement dépersonnalisé (il est ce que la doctrine veut qu’il soit), l’enfant n’est pas élevé en tant qu’individu avec les droits et les devoirs respectifs de son âge mais comme un futur adepte pour qui la doctrine tient lieu de pensée et de loi. C’est elle qui détermine sa place, son statut, sa vie quotidienne.

On peut alors parler de confiscation de l’exercice de la fonction parentale par la secte. Celle ci pouvant être encore plus radicale dans une communauté fermée.

Bibliographie

Le grand décervelage : enquête pour combattre les sectes
de Bernard FILLAIRE, Editions PLON, 1993.
Fruit d'une enquête centrée sur le travail de terrain de notre marraine Mme Janine Tavernier, cet ouvrage démontre, à travers de nombreux témoignages d'ex-adeptes, la cause et les effets du phénomène sectaire. Il décrit la manière dont on peut entrer dans une secte, y être manipulé et en sortir. Un livre utile de par sa présentation claire des processus à l'œuvre dans le fonctionnement sectaire, mais également pour l'apport de nombreuses informations pratiques et juridiques.

Vigilance et lutte contre les dérives sectaires
Éditions du Journal Officiel, août 2003, (réf. : 317470000)
Cet ouvrage rassemble des textes qui ont pour objectif la lutte contre les agissements répréhensibles des sectes notamment dans les domaines des atteintes contre les personnes physiques, les personnes morales, les biens, l'emploi, la formation professionnelle ... Il s'attache également à présenter les principales dispositions destinées à prévenir les dérives sectaires portant atteinte aux droits de l'homme et aux libertés fondamentales.

Mon voyage avec la Vierge de l'Apocalypse : Le témoignage d'une sociologue sur la manipulation mentale
de Anne EDELSTAM, Editeur : Publibook (septembre 2006)
Alors qu'elle traverse une crise identitaire due à sa solitude et au fait qu'elle ne peut travailler en France, Anne va pénétrer dans la spirale infernale de la manipulation mentale. Sous couvert de psychanalyse, Maud Pison va s'immiscer dans sa vie jusqu'à en prendre le contrôle. En suivant cette thérapie, Anne ne se doute pas qu'elle devient prisonnière d'une secte qui aurait pu lui coûter sa vie, son mariage et sa famille.

Dictionnaire des groupes religieux aujourd'hui
de Jean VERNETTE et Claire MONCELON, Editions PUF, Collection Quadrige, 2001.
Réédition en format de poche du Dictionnaire sorti en 1995. Il propose 450 notices signalétiques et 900 références sur les sectes et les "nouveaux mouvements religieux", les grandes religions, les Eglises et les mouvements spiritualistes.


La dérive sectaire
d'Anne FOURNIER et Michel MONROY, Editions PUF, Collection Le Sociologue, 1999.
La question de la dérive sectaire est complexe, tant interviennent de facteurs et de manières de l'appréhender. Cette analyse systémique rigoureuse fournit de multiples éclairages et des pistes de réflexion pour mieux saisir ce phénomène. Tous les paramètres et les diverses approches des acteurs spécialistes du problème, doivent être pris en compte, aussi ce travail se veut-il complémentaire à celui déjà entrepris jusqu'ici. Anne Fournier, historienne et Michel Monroy, psychiatre, démontent les mécanismes totalitaires à l'œuvre dans l'adhésion sectaire, le processus d'allégeance, les méthodes d'embrigadement, les structures de fonctionnement du groupe, le rôle et le profil du gourou. Les risques ainsi identifiés sont mis en perspective avec d'autres situations d'influence rencontrées dans des environnements institutionnels différents (santé, éducation, formation famille, ), afin de mieux distinguer la spécificité de la dérive sectaire. La secte occupe une fonction de réaction au contexte socioculturel actuel et de ce fait le phénomène n'est pas près de disparaître. C'est pourquoi la communauté doit apprendre à gérer la dérive sectaire. A cet effet, il convient d'entreprendre un vaste travail de prévention afin d'impliquer tous les acteurs et tous les citoyens.

Les sectes mangeuses d'hommes : comprendre le phénomène sectaire totalitaire
de Max BOUDERLIQUE, Editions L'Atelier de l'archer, 1999.
Dans cet ouvrage très pédagogique, le philosophe Max Bouderlique, offre les éléments d'analyse nécessaires pour éclairer le fonctionnement du phénomène sectaire totalitaire. La logique sectaire ne peut être appréhendée en profondeur sans connaître certaines notions indispensables de la philosophie et de la psychanalyse. Car ces fondements ''permettent de comprendre leurs conséquences dans l'organisation structurelle des sectes et sur le psychisme des adeptes''. Chacun des chapitres est introduit par un ensemble de questions couramment posées et se termine par une synthèse des points essentiels.

Le langage des sectes, Déjouer les pièges
de Laetitia SCHLESSER-GAMELIN, Editions J'ai Lu (juillet 2001), numéro 5863.
Le langage est un pouvoir ! Aussi sans fondement éthique, peut-il devenir une arme pour dominer autrui. Par quel mécanisme, le langage des sectes est-il mis à profit pour affaiblir, disqualifier et manipuler l'individu ? Comment peut-on devenir victime de ce langage ? C'est à ces questions encore peu explorées dans l'étude des sectes, que l'auteur, linguiste, consacre ce travail. A partir de nombreux extraits de textes internes (Scientologie, Soka Gakkai, Moon, Mouvement Raëlien, Nouvelle Acropole), elle analyse les structures de la langue et le contenu du discours sectaire. Les sectes se révèlent très habiles à communiquer, en faisant appel à des techniques de persuasion pour s'assurer du contrôle de l'échange. Usant d'un discours destiné à séduire, émouvoir, et convaincre, elle parviennent à créer une relation affective avec l'individu. Mais celle-ci s'avère déséquilibrée, car l'individu est privé de ses repères. Un langage hermétique, reconstruit ou constitué de mots détournés de leur sens, vient étayer des techniques argumentatives fallacieuses, par lesquelles les sectes s'attribuent le pouvoir de tout expliquer et de se présenter en pourvoyeuses de sens. Lorsqu'il ne dispose pas de moyens d'évaluer la légitimité de ce discours, l'individu devient victime de l'emprise du locuteur. Ainsi la redoutable efficacité du langage des sectes réside-t-elle dans sa capacité à faire naître chez l'individu un comportement de soumission librement consentie, qui le conduit progressivement d'un premier contact séduisant à l'enfermement sectaire.

Sectes : la loi vous protège, servez-vous de la loi
de François PIGNIER, Edité par CCMM, 1998.
Edité en partenariat avec le Ministère de la Jeunesse et des Sports, ce guide est destiné à faire connaître la législation pénale applicable aux sectes et les jurisprudences rendues. S'il s'adresse d'abord aux professionnels, sa présentation très claire le rend accessible aux victimes des sectes souhaitant défendre leurs droits. Pour chacune des principales infractions relevées dans les milieux sectaires, figure la référence au texte de loi applicable avec les peines encourues, ainsi que les éléments constitutifs de l'infraction.

Protégez-vous contre les sectes
de Steven HASSAN, Editions du Rocher, 1995.
Ancien adepte de la secte Moon aux Etats-Unis, Steven Hassan exerce aujourd'hui le métier de " exit counselor " ("conseiller pour sortir des sectes"). Il décrit de manière saisissante l'opération de contrôle de la pensée dont il fut victime et apporte une information pertinente sur la manière d'identifier les organisations destructrices pour s'en protéger. Sorti de secte par la méthode du "déprogramming", il met en garde contre son caractère illégal et les séquelles possibles. Aussi préconise-t-il une méthode douce. Il explique comment aider un proche qui a rejoint une secte, ou un ex-adepte. Il recommande le dialogue, la compréhension mutuelle, la prise de conscience et la déculpabilisation.

Comprendre l'action des sectes : réagir face aux sectes
de Max BOUDERLIQUE, Editions Chronique Sociale, 1995.
Analyse approfondie du paysage sectaire : caractéristiques, typologie, méthodes d'influence et de manipulation exercées par les gourous de sectes. Cet ouvrage montre que leurs objectifs ne visent en réalité que la satisfaction de leur appétit de puissance et de domination. Les doctrines prétendues religieuses, philosophiques, humanistes, ésotériques, voire scientifiques, constituent autant de masques séducteurs.

Etre victime, aides et recours
de Carole DAMIANI et Corinne VAILLANT, Librairie Vuibert, octobre 2003.
L'un des intérêts de ce livre est de « parler des victimes de sectes au même titre que des victimes classiques et de découvrir que les réflexions concernant les victimes classiques peuvent servir pour les victimes de sectes ». Dans la secte, l'individu perd non seulement sa dimension de personne et de citoyen, mais elle agit « comme un lieu de fabrique d'un état de faiblesse ». Cet état est ensuite verrouillé « par le cadenas de la culpabilité ». Le nouvel adepte se sentira « coupable » de douter et de penser par lui-même, de remettre en question le gourou et sa doctrine. C'est là qu'il deviendra « véritablement adepte ». Dans la secte, les adeptes ne se perçoivent pas victimes, ils se croient et se disent libres dans leurs choix et dans leurs actes. Ils sont enfermés dans une « séquestration virtuelle ou magique » et refusent toute aide extérieure. Une fois sortis, les ex-adeptes se sentent fortement culpabilisés de « s'être mis volontairement dans une souricière »…
et d'y être restés. Ils sont, de plus, survictimés par la non-reconnaissance de leur souffrance et de leur position de victime. L'emprise sectaire perdurera ensuite « hors des murs sectaires », alimentée par la culpabilité, l'un des derniers bastions de leur dépendance… Ainsi des victimes de sectes se dégage une spécificité propre qui fait que leur prise en charge psychothérapeutique et juridique doit être particulière. La psychothérapie d'un ex-adepte réclame une bonne compréhension des mécanismes sectaires, nécessite une formation à « la psychothérapie de l'emprise » et demande enfin une connaissance de la doctrine propre à la secte concernée. De même, la prise en charge juridique de l'ex-adepte appelle à une prise en charge de la doctrine et des conséquences « victimisantes » de l'emprise sectaire.